Marché du chocolat : Les Français et le cacao, une histoire d’amour à l’épreuve des cours

Produit incontournable de (presque) tous les foyers Français, le chocolat enregistre des volumes de ventes en progression en 2024 alors que les cours du cacao n’ont jamais été aussi hauts. Par Cécile Buffard Au lendemain des fêtes de Pâques, le marché du chocolat confirme sa résilience, face à la flambée du cours du cacao. En hausse de 365 % entre janvier 2023 et janvier 2025, pour des raisons essentiellement climatiques (l’ouragan El Nino a détruit une partie des récoltes de la Côte d’Ivoire et du Ghana qui ont subi, successivement, des épisodes de sécheresse et de pluies diluviennes), le coût de la matière première a mécaniquement impacté la valeur du produit fini. Mais pas de quoi freiner la consommation des Français. En 2024, les ventes en GMS ont progressé de 1,9 % en volumes et de 8,4 % en valeur, pour atterrir à un chiffre d’affaires annuel de 3,9 Mds €. « Malgré un cours du cacao très élevé l’an dernier, les ventes ont continué de croître, prouvant que le lien entre les Français et le chocolat reste fort », constate Gilles Rouvière, Secrétaire Général du Syndicat du Chocolat. En effet, 99,3 % des foyers consomment du chocolat au moins une fois par an. À Pâques, le chocolat est roi Avec un budget moyen de 24 € par foyer dédié aux cloches, cocottes, œufs, fritures et autres spécialités cacaotées, Pâques reste la période où le savoir-faire chocolatier est le plus valorisé. Les créations des chefs sont mises en lumière sur les réseaux sociaux, les chocolateries rivalisent de créativité (tous les animaux, mêmes oniriques, ont droit à leur réplique en chocolat) et les rayons de GMS regorgent d’offre Pasquale. Les ventes de Pâques 2024 ont enregistré une hausse de 3,7 % en volume par rapport à 2023 renouant ainsi avec son niveau de ventes d’avant la crise Covid. « Si Pâques ne représente que 5 % des ventes globales de chocolat dans l’année, c’est une période de pic d’activité et un moment de consommation-clé pour les entreprises », note Gilles Rouvière. Pour 2025, la saison s’annonce proche de l’équilibre et, il l’espère, positive, sous réserve de nouveaux incidents climatiques. « Face à ces aléas, les entreprises investissent dans la R&D pour développer de nouvelles variétés de cacao plus résistantes, et sécuriser l’approvisionnement en matière première », explique-t-il. Un marché dynamique De façon globale, le Syndicat se veut optimiste et confiant pour l’année 2025 qui enregistre, sur le premier trimestre, des volumes de ventes encourageants, d’autant que la grande distribution joue le jeu. « Les négociations commerciales ont montré que les enseignes de GMS n’ont pas réduit la voilure sur les commandes pour Noël et maintiennent une offre fournie en rayon », se réjouit Gilles Rouvière. En outre, les récoltes de cacao s’annoncent meilleures qu’en 2024. Le marché se montre très dynamique avec de nombreuses innovations, des relancements (Merveilles du Monde en 2024) et l’arrivée de nouveaux entrants. Le succès fou du chocolat de Dubaï – une tablette fourrée à la crème de pistache onctueuse – qui, depuis des semaines, envahit les réseaux sociaux et fait un carton en grande distribution, atteste de l’engouement des Français (et du reste du monde) pour le cacao et son appétence à tester de nouvelles saveurs. « Pas de guerre des chocolats » L’autre tendance qui est loin de faire l’unanimité est celle du “faux chocolat”, à base de pépins de raisins ou de graines de tournesol. La Confédération des Chocolatiers et Confiseurs de France (CCCF) voit dans ces substituts une “menace” pour la profession (quelque 2 000 artisans et TPE), déjà confrontée à un contexte économique fragile, marqué par la hausse des coûts et les menaces fiscales. « Le chocolat est un patrimoine gastronomique français. Chaque tablette, chaque praline est le résultat d’un travail minutieux, d’une sélection rigoureuse des meilleures fèves de cacao. L’imitation n’a pas sa place dans notre métier », soutient Thierry Lalet, président de la CCCF, qui rappelle que selon Santé.gouv, peut utiliser la terminologie “chocolat” un produit obtenu à partir de produits de cacao et de sucres contenant, au moins de 35 % de matière sèche totale de cacao, dont pas moins de 18 % de beurre de cacao et 14 % de cacao sec dégraissé. Gilles Rouvière, de son côté, tempère. « Nous ne sommes pas contre l’innovation dès lors que le consommateur est clairement informé. Nous considérons que ces produits appartiennent au monde de la confiserie, non à celui du chocolat, et qu’ils n’ont pas vocation à le remplacer ». Il concède également que ces alternatives, plus économiques que le chocolat, peuvent être une solution pour des TPE/PME qui ne peuvent absorber l’évolution des prix du cacao, assurant que le Syndicat « ne veut pas de guerre des chocolats » qui diviserait la filière, à un moment critique de son histoire, où il faut être solidaires.